Travailler en Suisse: le dilemme entre être Frontalier ou Résident

Si vous envisagez de travailler en Suisse, la question se pose: vaut-il mieux habiter en France et être travailleur frontalier, ou habiter en Suisse et être travailleur résident?

Vous avez trouvé un emploi en Suisse ou envisagez de travailler en Suisse? Dans ce cas, vous vous posez certainement la question du logement. D’un côté, habiter en France vous permettrait de profiter d’un gros pouvoir d’achat et du cadre de vie qui en découle. D’un autre côté, habiter en Suisse simplifierait largement votre vie quotidienne. Dans cet article, découvrez tous les avantages et inconvénients à être travailleur frontalier ou travailleur résident quand on travaille en Suisse!

Au sommaire

Travailleurs frontaliers: des avantages et inconvénients bien connus

De plus en plus de personnes travaillant en Suisse choisissent d’habiter en France, où le coût de la vie (et notamment du logement) est beaucoup moins élevé. Le prix à payer est souvent l’allongement du temps passé dans les transports, véritable cauchemar pour certains.

Les hauts salaires de la Suisse et le faible coût de la vie en France

Les salaires sont certes significativement plus élevés en Suisse qu’en France, mais proportionnels au coût de la vie (notamment du logement) des deux côtés de la frontière. C’est-à-dire que, toute chose égale par ailleurs, une personne qui habite et travaille en Suisse aura un pouvoir d’achat similaire à une personne qui habite et travaille en France. En effet, elle touchera un salaire plus important grâce aux hauts salaires suisses mais aura des dépenses plus importantes en raison du coût de la vie élevé en Suisse.

En revanche, une personne qui habite en France et travaille en Suisse peut avoir, en théorie, un pouvoir d’achat beaucoup plus élevé. En effet, elle peut profiter à la fois des salaires élevés de la Suisse et du coût de la vie moindre (notamment du logement) de la France. C’est là le principal avantage, et le plus connu, des travailleurs frontaliers: le pouvoir d’achat, et la qualité de vie qui peut en découler.

Le transport: le point noir des travailleurs frontaliers

En revanche, le principal inconvénient des travailleurs frontaliers est sans aucun doute le transport. La quasi-totalité des axes routiers est fortement congestionnée autour de la frontière franco-suisse, et les temps de trajet très longs, y compris pour de courtes distances. Dans la plupart des cas, il est plus intéressant d’utiliser un autre moyen de transport que la voiture:

  • Le vélo et le vélo électrique, pour ceux qui habitent très proche de la frontière;

  • Les lignes ferroviaires du Léman Express, pour ceux qui habitent proche d’une gare;

  • Les lignes des Transports publics genevois (TPG), pour ceux qui sont desservi.

Pour optimiser vos trajets, il est recommandé de mixer les modes de transports, par exemple en conduisant jusqu’à un parking relais (P+R) ou une gare pour prendre les TPG ou le Léman Express. Quoi qu’il en soit, si vous souhaitez être travailleur frontalier, l’endroit où vous choisissez d’habiter aura une grande incidence sur votre quotidien en matière de transport.

 

Administratif et emploi: un système pensé pour les résidents

Au-delà de ces considérations bien connues, votre choix de vivre en France ou en Suisse peut aussi avoir de multiples incidences sur votre quotidien. Le monde du travail et les formalités administratives suisses (fiscalité, couverture sociale, etc.) sont en effet pensés en priorité pour les résidents.

Emploi et salaire: un monde du travail avantageux pour les travailleurs résidents

Les autorités helvètes semblent soutenir les travailleurs frontaliers, elles ont même créé un permis de travail spécifique pour cette situation: le permis G. Cependant, dans les faits, le marché du travail suisse a tendance à privilégier les résidents aux travailleurs frontaliers.

En effet, de nombreux employeurs suisses privilégient les résidents au moment de l’embauche, quelle que soit leur nationalité. Toute chose égale par ailleurs, une personne qui habite en France aura généralement moins de chance d’être embauchée qu’une personne qui habite en Suisse (dîtes-vous que, si vous avez déjà trouvé un travail, cela s’applique aussi à votre conjoint). Ce phénomène s’applique particulièrement dans certains secteurs, tel que le domaine bancaire.

La préférence de certains employeurs suisses pour les résidents peut aussi se traduire au niveau du salaire. Il n’est pas rare que les travailleurs frontaliers soient moins bien payés que les résidents à poste égal, ce qui se justifie parfois par la volonté d’équité salariale (le coût de la vie étant plus élevé en Suisse). Les négociations de salaire sont aussi plus délicates pour les travailleurs frontaliers.

Bon à savoir: le phénomène est moins visible pour les métiers en tension et chez les employeurs qui rencontrent des difficultés à recruter.

Imposition: une fiscalité avantageuse pour les travailleurs résidents

Le système d’imposition suisse est très complexe: il diffère en fonction du canton de travail, du pays de résidence et du niveau de revenu. Les travailleurs résidents doivent toujours payer leurs impôts en Suisse, alors que les travailleurs frontaliers doivent (dans la plupart des cas) payer leurs impôts en Suisse s’ils travaillent dans le canton de Genève, mais en France s’ils travaillent dans le canton de Vaud ou du Valais.

Or, si vous êtes travailleurs frontalier, vous avez tout intérêt à payer vos impôts en Suisse. En effet, l’impôt sur le revenu est progressif en France, et votre salaire suisse vous place parmi les plus hauts revenus du pays: vous serez donc fortement imposé. Bien que l’impôt sur le revenu soit également progressif dans la plupart des cantons suisses, il est globalement moins élevé et votre salaire sera plus dans la moyenne: vous serez donc moins imposé.

D’un point de vue purement fiscal, mieux vaut donc habiter en Suisse, ou travailler dans le canton de Genève, mais évitez d’habiter en France si vous travaillez dans le canton de Vaud ou du Valais!

Couverture sociale: un système avantageux pour les travailleurs frontaliers

Le système de couverture sociale suisse est également pensé pour les travailleurs résidents, mais de nombreuses modalités permettent de l’adapter aux travailleurs frontaliers. Au final, les premiers n’ont pas de réels avantages par rapport aux seconds, c’est même plutôt l’inverse.

Tout d’abord, concernant l’assurance maladie, les travailleurs frontaliers peuvent choisir entre le système suisse (la LAMal) et le système français (la Sécurité Sociale): c’est ce qu’on appelle le droit d’option. Ils peuvent donc choisir le système le plus avantageux selon leur situation, alors que les travailleurs résidents sont obligés de cotiser à la LAMal, ce qui revient souvent plus cher.

Concernant les allocations familiales, les travailleurs résidents concernés les touchent en Suisse alors que les travailleurs frontaliers les touchent en France. Et, contrairement aux idées reçues, ces allocations sont souvent plus avantageuses en Suisse qu’en France. Cependant, les autorités suisses peuvent verser une allocation différentielle aux travailleurs frontaliers pour compléter leurs allocations françaises : ils ne sont donc pas pénalisés par rapport aux résidents.

 

La “double-vie” des travailleurs frontaliers: un inconvénient souvent oublié

Au-delà de toutes ces considérations pratiques et objectivables, la vie de travailleur frontalier peut induire certaines difficultés sociologiques et psychologiques. Ces inconvénients, souvent oubliés, peuvent remettre votre choix en question.

Des difficultés d’intégration sociale en Suisse?

De nombreux travailleurs frontaliers relatent de mauvaises expériences concernant leur intégration en Suisse. Bien entendu, tout le monde n’est pas concerné, mais certains ne se sentent jamais vraiment acceptés. Pour cause, leur mode de vie pendulaire peut les éloigner de plusieurs aspects de la vie de tous les jours: sorties entre collègues, relations de voisinage, engagements associatifs, etc.

Or, la culture suisse est très locale, peut-être en raison de l’histoire parcellée du pays, de sa division en cantons, de ses différentes langues, etc. Une personne qui ne vient que pour travailler, sans jamais s’impliquer dans la vie locale, peut ainsi avoir du mal à s’intégrer. C’est finalement assez évident, et un peu la même chose partout, mais le phénomène semble exacerbé en Suisse…

Dans certains cas, ces difficultés d’intégration sociale peuvent aussi se produire en France. En effet, passer vos journées à travailler de l’autre côté de la frontière peut aussi vous éloigner de la vie quotidienne de votre famille et de vos amis côté français. C’est d’autant plus le cas si votre travail et vos trajets sont chronophages.

Un sentiment d’isolement et de déracinement?

Au-delà des aspects sociaux, le mode de vie pendulaire des travailleurs frontaliers peut également avoir un impact psychologique. Tout d’abord, les difficultés d’intégration, d’un côté ou de l’autre de la frontière, peuvent conduire à une certaine forme d’isolement social. Mais le fait de sans cesse passer d’une culture à l’autre peut aussi amener les travailleurs frontaliers à se sentir déracinés. C’est pourquoi certains finissent par choisir de s’installer en Suisse.

Bien entendu, tout le monde n’est pas concerné, loin de là. Mais il est important d’être conscient du fait que la vie pendulaire du travailleur frontalier est assez particulière, et que cela peut avoir certaines conséquences sociales et psychologiques.

 

Conclusion: une question de choix et de projet de vie

Pour résumer, le principal avantage des travailleurs frontalier est leur pouvoir d’achat supérieur en raison des hauts salaires suisses et du coût de la vie moins élevé en France. Cependant, ce pouvoir d’achat s’obtient en échange de certaines difficultés (emploi, salaire, fiscalité, administratif, liens sociaux…) plus ou moins marquées selon les cas. C’est pourquoi certains préfèrent être travailleurs résidents en Suisse, malgré le fait que cette situation apparaisse moins avantageuse d’un point de vue économique.

Mais le choix d’habiter en France ou en Suisse dépend aussi de votre situation et de vos projets de vie. De nombreuses autres considérations, notamment familiales, vont influencer votre choix: où habitent votre famille et vos amis, où travaille votre conjoint, où vous souhaitez faire carrière, où vous souhaitez passer votre retraite, où vous souhaitez éduquer et voir grandir vos enfants, etc.